vendredi 7 octobre 2011

S.IV, I,3. Le signifiant et le Saint-Esprit

             Séminaire IV : LA RELATION D'OBJET ET LES STRUCTURES FREUDIENNES

                           partie I :   THEORIE DU MANQUE D'OBJET

                                      leçon 1. Introduction
                                              2. Les trois formes du manque d'objet
                                              3. Le signifiant et le Saint-Esprit
                                              4. La dialectique de la frustration
                                              5. De l'analyse comme bundling, et ses conséquences.



J'ai dit le bien que je pensais de l'exposé de Madame DOLTO sur l'image du corps. Nous savons que 
l'image du corps n'est pas un objet. Bien que la notion d'objet a son importance dans la définition 
des stades du développement, l'image du corps n'est pas un objet, ne le devient pas = important à
dire pour la situer parmi les objets à propos desquels on se pose la question de leur nature imaginaire.

2 exemples : la phobie et le fétiche, pour aborder ces objets possiblement imaginaires tels qu'ils nous
sont donnés dans l'expérience analytique. Objets qui n'ont pas révélé leur secret, à quelques genèses
ou contorsions fantasmatiques qu'on se soit livré : cela reste mystérieux, que les enfants, filles et
garçons, se croient obligés à certaine période de leur vie d'avoir peur des lions par exemple, objet
peu rencontré, dont il est difficile de déduire la forme de quelque donnée primitive ou inscrite, par ex.,
de l'image du corps. On peut essayer, il restera toujours un résidu (ce qu'il y a de plus fécond dans les
 explications scientifiques, et l'escamoter annulerait le progrès).

De même le nombre des fétiches sexuels est assez limité, sortis des chaussures et autres jarretières,
toutes choses tenant d'assez près à la peau. La question : sont-ce des objets imaginaires ? quelle est
leur valeur ds l'économie libidinale ? sortent-ils d'une genèse ? d'une succession de stades ?
En tout cas si ce sont des objets nous en sommes fort embarrassés, et le thème nous fascine.

Au 1er abord ce sont des constructions ordonnant et organisant un certain vécu. L'usage qu'en fait
Madame DOLTO est frappant, usage qu'on ne peut comprendre qu'avec les notions de signifiant
et de signifié : en effet elle use de cet objet comme d'un signifiant, c'est comme signifiant que l'image
intervient dans son dialogue et représente quelque chose, aucune ne se soutenant par elle-même.
Et quand une image prend valeur cristallisante, qu'elle pénètre, en l'orientant, le sujet, c'est toujours
par rapport à une autre.

Certaines choses que j'ai dites la dernière fois sur la notion de réalité n'ont pas été comprises.
J'ai dit que des psychanalystes en ont une notion aussi mythique que celle
qui a entravé la psychiatrie,qui est de chercher quelque chose de matériel dans la réalité.
 C'est comme si, dans mon exemple de l'usine hydraulique, quand des accidents surviennent on
raisonnait uniquement sur la matière qui la fait marcher, la chute d'eau. Et bien on est venu me dire
que pour l'ingénieur elle est tout, que tout est déjà donné dans son énergie potentielle,
y compris la puissance de l'usine ... Or :
1 : j'ai défini la réalité par la Wirklichkeit, l'efficacité du système, psychique en l'occurrence.
2. j'ai pris l'ex de l'usine pour illustrer le caractère mythique d'une certaine conception de la réalité.
3. on peut présenter le thème du réel en considérant la réalité de "ce qui est avant", avant l'exercice
d'un fonctionnement symbolique, à ce qu'il y a de plus solide dans le mirage qui soutient l'objection
qui m'a été faite. Avant qu'advienne le "Je" par exemple, était le "ça" => qu'est-ce que ce "ça" ?

Pour l'usine je sais bien qu'avant il y a l'énergie, mais entre cette énergie et la réalité naturelle il y a
un monde, d'autre part elle ne compte qu'à partir du moment où on décide de la mesurer, une fois
que l'usine fonctionne. C'est à propos de l'usine qu'on fait des calculs, parmi lesquels l'énergie.
La notion d'énergie est construite sur la nécessité d'une civilisation productrice, et de s'y retrouver
dans ses comptes = quel travail dépenser pour telle efficacité ? Et il n'y a pas d'énergie absolue,
uniquement par rapport à un niveau inférieur, le déversoir lui-même ne suffit pas à lui seul.

La différence du niveau d'écoulement n'a pas d'intérêt, l'important c'est que pour qu'il y ait intérêt
à calculer l'énergie certaines conditions naturelles soient réalisées, et aussi que les matières comptant
dans l'usage de la machine se présentent d'une manière privilégiée, signifiante, qui pousse à l'installer
une usine = on est sur le chemin d'un système pris comme signifiant.

Rapprochement avec le psychisme : avec cette notion énergétique Freud forge la notion
en elle-même totalement abstraite car fixée à aucun support matériel, et permettant
de poser une équivalence entre des manifestations qualitativement différentes : la notion de libido. 
On peut s'émerveiller que dès 1905 (Les trois essais ..) il parle pour la 1ère fois de
 support psychique de la libido dans des termes tels que la notion ultérieure d'hormones sexuelles
ne l'oblige qu'à peine à modifier ce passage. Parce que ds cette occurrence se référer à un support
chimique n'a strictement aucune importance : qu'il y en ait un, ou plusieurs, un pour la féminité, un
pour la masculinité, ou plusieurs, ou interchangeables, ou noir .. l'expérience analytique contraint
à penser qu'il n'y a qu'une seule et unique libido, que Freud situe d'emblée sur un plan neutralisé.

La libido est ce qui lie le comportement des humains entre eux et leur donne leur position
qui peut être active ou passive, mais a dans tous cas des effets actifs. Que cette position
 active ou passive, la libido se présente toujours comme une forme activement efficace,
et de ce fait plutôt parente de la forme masculine. Cela semble paradoxal, mais c'est parce que
cette notion n'est là que pour incarner la liaison de type particulier qui se produit à un certain niveau
le niveau imaginaire qui est celui où le comportement d'un être vivant en présence d'un autre
exprime le désir, ou l'envie, c'est à dire est du coté de ce ressort essentiel de la pensée freudienne
pour organiser ce dont il s'agit dans tous les comportements de la sexualité.

Nous avons l'habitude de considérer le Es comme une instance ayant le plus grand rapport avec
les tendances, les instincts, la libido. Mais comme l'usine quand on ignore comment elle marche,
 et qu'on croit que c'est le courant qui, agissant en elle, transforme l'eau en lumière ou en force ..
le Es n'est pas simplement ce qui est là, avant, le Es c'est déjà le Sujet, c'est à dire
ce qui est susceptible, par l'intermédiaire du message de l'Autre, de devenir "Je".
C'est cela que la psychanalyse nous a apporté :
il n'est pas seulement ce qui est avant en tant que réalité brute,
il est ce qui est, déjà organisé, déjà articulé, comme le signifiant est : déjà articulé, déjà organisé.

Toute la force déjà dans la machine pourra être transformée, sachant qu'elle n'est pas que chose
à transformer, elle peut aussi être accumulée. C'est l'intérêt de l'usine  hydro-électrique (et non
hydro-mécanique) : bien qu'il y ait déjà toute cette énergie avant, une fois l'usine construite il y a
différence sensible qui existe dans le réel, pas seulement dans le paysage. Elle s'est construite
par l'opération du saint-esprit, et c'est pour comprendre la présence du saint-esprit, essentielle
à notre compréhension de l'analyse, que je vous donne ces indications sur le signifiant et le signifié.

Reprenons cela au niveau des deux systèmes : le système primaire où ce qui se passe est soumis 
au principe de plaisir, à la tendance à revenir au repos, et le système secondaire défini par le fait
que le sujet est forcé à un détour dans la réalité extérieure. Ces définitions ne éludent l'idée de
 caractère conflictuel et dialectique alors qu'on les utilise avec ce paradoxe. Eludé, pas oublié.

C'est avec le système de plaisir lié à une tendance répétitive au repos que Freud introduit la notion
de libido parce que le plaisir au sens concret, le LUST, a ce sens -ambigu- d'être en même temps
le plaisir et l'envie, plaisir comme état de repos en lui-même, et surgissement du désir. Les 2 termes
peuvent paraître contradictoires alors que l'expérience les montre comme étant parfaitement liés.
Paradoxe aussi au niveau de la réalité : ce n'est pas seulement la réalité à laquelle on se cogne,
c'est aussi le contour, et le détour, de la réalité.

C'est à dire que corrélativement à l'existence des 2 principes interviennent les 2 termes qui les lient
 et permettent leur fonctionnement dialectique : les 2 niveaux de la parole : signifiant + signifié.
Et nous avons une sorte de superposition, de parallèle
--------> le cours du signifiant, le discours concret ..........................................................................
--------> le cours du signifié où gît la continuité du vécu, des tendances, chez 1 sujet et entre les sujets.

Rien ne se conçoit de la parole, du langage, des phénomènes qui se présentent ds l'analyse,
sauf à admettre cette possibilité essentielle de perpétuels glissements,
perpétuels glissements du signifié sous le signifiant, glissements du signifiant sous le signifié.
Rien de l'expérience analytique ne peut s'expliquer hors de ce schéma fondamental, qui montre que
ce qui est signifiant de quelque chose peut à tout instant devenir signifiant d'autre chose.
Tt ce qui se présente dans l'envie, tendance, libido, est toujours marqué par l'empreinte du signifiant.
Cela n'exclut pas que dans la pulsion ou l'envie existe autre chose, non marqué par cette empreinte.
Le signifiant est introduit dans le mouvement naturel, dans le désir, et dans la demande. Le terme
anglais "demand" inclut la notion primitive d'exigence, d'appétit, même si l'appétit en tant que tel n'est
pas marqué par les lois propres du signifiant. Ainsi on peut dire que l'envie devient du signifié.

L'intervention du signifiant posant problème,  j'ai parlé du Saint-Esprit qui est, pour nous et dans
la pensée de Freud, l'entrée du signifiant dans le monde. Freud l'a appelé  instinct de mort :
limite du signifié jamais atteinte par un être vivant, ce quelque chose virtuellement à la limite de
la réflexion de l'homme sur sa vie qui lui permet d'entrevoir la mort comme étant la "condition
indépassable de son existence" (Heidegger). Les rapports de l'homme avec le signifiant sont
liés à cette possibilité de penser la suppression, la mise entre parenthèse de tout le vécu.

Le support de la présence dans le monde du signifiant, la "surface efficace" où il reflète
le dernier mot du signifié, de la vie, du vécu, du flux des émotions, du flux libidinal, c'est
une "mort", une opération du St-Esprit, qui fait exister ce signifiant et ses lois propres,
qu'elles soient ou non reconnaissables ds tel ou tel phénomène. Par exemple, à la question
"Ce signifiant est-il là ce qui est désigné dans le Es ?", nous répondons que : pour comprendre
ce que nous faisons dans l'analyse : oui." Car le Es dont il s'agit dans l'analyse c'est 
du-signifiant-déjà-là, du signifiant déjà là dans le réel, mais incompris.
Et pas quelque propriété primitive et confuse relevant d'on ne sait quelle harmonie pré-établie
comme le pensent les esprits faibles, Mr Jones le 1er qui fait l'erreur de partir de l'idée qu'il y a
le fil et l'aiguille, le fille et le garçon + la supposition d'une harmonie pré-établie avec l'inconscient
de l'un fait pour deviner l'inconscient de l'autre.

A quoi s'oppose la remarque si simple de Freud (Les 3 essais..) que rien dans le développement de
l'enfant, dans son rapport aux images sexuelles, ne montre les rails d'un accès libre de l'homme
vers la femme et vice-versa, mais susceptibles d'accidents. Au contraire, les théories
sexuelles infantiles, qui marqueront l'histoire du sujet dans sa relation entre les sexes, sont liées à la
1 ère maturité du stade génital, ou phase phallique, juste avant le développement complet de l'Oedipe.
Ce stade est dit phallique, pas par égalité énergétique fondamentale (ça c'est pour la commodité
de l'esprit), ni même parce qu'il n'y a qu'une seule libido, mais parce que
sur le plan imaginaire il n'y a qu'une seule représentation primitive du stade génital :
le phallus en tant que tel.

Le phallus n'est pas l'appareil génital masculin c'est son image érigée sans son complément
que sont les bourses. Le phallus érigé dans son image. Il n'y en a qu'une parce qu'il n'y a pas
d'autre choix : soit l'image virile, soit la castration.
C'est le point de départ de Freud quand il reconstruit le développement, à partir des références
naturelles à cette idée, découverte dans l'analyse, et dans ce qui antécède "Les trois essais.."

Mais l'expérience nous fait découvrir une foule d'accidents loin d'être si naturels. En particulier
cette idée au principe de toute l'expérience analytique, la notion de signifiant déjà installé,
déjà structuré (l'usine existe et fonctionne sans que nous l'ayions installée) : c'est le langage,
qui fonctionne depuis aussi longtemps qu'on peut s'en souvenir, sachant qu'on ne peut pas
se souvenir de l'au-delà de l'histoire de l'humanité. Depuis que les signifiants fonctionnent
les sujets sont organisés, dans leur psychisme, à partir du jeu de ces signifiants.
Même le Es, que certains vont chercher dans des "profondeurs" n'est pas plus naturel que les images
L'existence d'une usine faite dans la nature par l'opération du saint-Esprit, est le contraire
de la notion de nature. C'est même dans le "scandale" de ce fait que gît la position analytique :
quand nous abordons un sujet, il y a déjà, dans "la nature", quelque chose qui est son Es,
qui est déjà structuré selon une articulation, une organisation signifiante, marquant tout, chez lui,
de ses empreintes, ses contradictions, sa profonde différence d'avec des cooptations naturelles.

Derrière le signifiant il y a la réalité dernière, voilée à l'usage du signifiant, voilée au signifié, que
la vie est caduque, ce qui est dans le signifié peut ne pas exister : c'est l'instinct de mort.
Cela n'a rien à voir avec l'exercice du vivant, notre petit passage dans l'existence comme tous ceux
qui nous ont précédé. L'existence du signifiant est liée au fait que le discours existe,
qu'il est déjà introduit dans le monde, plus ou moins connu, ou inconnu. Freud n'a pas pu le
caractériser autrement qu'en disant qu'il fonctionne sur le fond d'une certaine expérience de la mort.
Pas celle ayant à voir avec le vécu, l'exercice du vivant, mais une reconstruction
motivée par ce phénomène inexplicable, ce paradoxe constaté dans l'expérience, que le Sujet
se comporte de façon essentiellement signifiante en répétant indéfiniment quelque chose
qui lui est mortel en tant que sujet (le sujet n'est pas la personne physique)
et inversement : la mort est reflétée au fond du signifié, et le signifiant emprunte toute une série
d'éléments liés à ce qui est engagé dans le signifié : le corps. De même que dans la nature il y a des
réservoirs, dans le signifié il y a des éléments qui, donnés comme des accidents du corps, sont repris
dans le signifiant et lui donnent ses "armes" premières. Choses insaisissables et pourtant irréductibles,
parmi lesquelles le terme phallique, la pure et simple érection : pierre dressée, totem érigé etc..
La notion de corps érigé produit des éléments liés au corporel en général (pas judte le vécu)
et constituant des éléments premiers : d'abord empruntés à l'expérience et ensuite complètement
transformés, car symbolisés, introduits dans le lieu du signifiant et de ses lois, des lois logiques,
(pensez au jeu de pair/impair, aux suites de + et de - groupées par 2 ou 3 en séquences temporelles)
des lois implicites, présentes dans tout départ et aussi lois dernières, impossibles à ne pas rencontrer.

[Notes, provisoires : ds la mesure ou une fois désigné sous un signifiant, et parce que épinglé, 
le sujet disparaît, meurt au fait d'être un sujet,derrière le signifiant = la mort, = la vie est finissable, 
caduque, ce qui est ds le signifié peut ne pas exister= l'instinct de mort dc pas seulement la capacité
 de se penser dans la chaîne mais de se penser inexistant, sous un signifiant.ainsi il y a ds le signifié des significations d'accidents du corps que le signifiant utilise comme armes]


La relation d'objet centrale décrite dynamiquement ds l'expérience analytique 
est celle du manque. C'est ce qu'a dit Freud : toute Findung est une Wiederfindung :
toute "trouvaille" de l'objet est une "re-trouaille". Il ne faut pas lire "Les trois essais sur la sexualité"
comme s'ils avaient été écrits d'un seul jet, tous les textes de Freud ils comportent des révisions,
des notes ajoutées, et les modifications sont fréquentes. "La Traumdeutung" s'est enrichie sans que
change son équilibre fondamental. Par contre dans la 1ère édition des "Trois essais.." on ne trouve rien
de ce qui nous est familier dans le livre de 1915, des années après "Pour introduire le narcissisme".
Il faut avoir cela en tête : tout ce qui concerne le développement libidinal pré-génital ne se conçoit
qu'après qu'aient été isolées les théories sexuelles infantiles et ce qui les caractérise, c'est à dire
les malentendus majeurs qui viennent du fait que l'enfant n'a aucune notion de sperme, vagin,
génération etc.. Et la notion de phase phallique n'aboutit qu'après l'édition de 1923 et l'article
"L'organisation génitale infantile", moment crucial qui n'est pas dans "Les trois essais..", dont
la progression dans la rechercher s'explique par l'importance des théories sexuelles.

De même pour la libido, avec un chapitre qui concerne la notion de narcissisme : on peut
rendre compte de l'origine de l'idée d'une théorie de la libido, dit Freud, depuis la notion de
Ich-libido, de "réservoir" de la libido constituante des objets.
Cette notion de tension narcissique, du rapport de l'homme à l'image, a introduit l'idée d'une
mesure libidinale commune, et d'un centre de réserve à partir duquel s'établit toute relation
objectale. Celle-ci est fondamentalement imaginaire, et la fascination du sujet par l'image est liée
à une image qu'il porte en lui-même. C'est le dernier mot de la théorie narcissique.

Une certaine orientation analytique reconnait une valeur organisatrice au fantasme parce qu'on ne
soupçonnait pas d'harmonie pré-établie de l'objet au sujet : la 1 ère version des "Trois essais .."
caractérise le développement de la sexualité infantile en 2 temps : du fait de la période de latence,
(où la mémoire est latente), l'objet 1er, l'objet de la mère, est remémoré d'une façon inchangée,
irréversible : l'objet ne sera plus, que (re)trouvé dans une nouvel objet dans le style du 1er.
 ==>  discordance, division  fondamentalement conflictuelle, dans l'objet (re)trouvé
par rapport à l'objet toujours recherché. Cette notion inspira la 1ère théorie de la sexualité
 de Freud : la supposition que pendant la période de latence il y a conservation de l'objet dans
la mémoire, à l'insu du sujet : transmission signifiante d'un objet, qui perturbera les relations
d'objets ultérieures. C'est dans ce cadre que se découvrent les fonctions imaginaires :
tout ce qui relève de la fonction pré-génitale est pris dans cette parenthèse. Ainsi s'introduit
l'imaginairedans une dialectique qui n'était faite que du symbolique et du réel.

Ainsi ce qui prévaut aujourd'hui en psychanalyse, la relation d'objet, n'est introduit par Freud
qu'à partir de l'article sur le narcissisme de 1923 : préparé par la théorie de la sexualité de 1915,
puis formulé à propos de la phase phallique en 1920.  Le milieu analytique, perplexe, a situé
la dialectique dite à l'époque pré-génitale par rapport à l'Oedipe. Or pré-génital ne veut pas dire
pré-oedipien. En 1920 pré-génital désigne les expériences préparatrices à l'expérience oedipienne
et qui s'articuleront dans celle-ci, faisant que la relation pré-génitale s'appréhende dans l'articulation
signifiante de l'Oedipe.  Le terme "pré-oedipien" est introduit en 1930 sur la sexualité féminine.

Le signifiant prend son matériel quelque part dans le signifié, dans les rapports vivants
et vécus. C'est après-coup que ce passé est saisi, que se structure l'organisation imaginaire
en opposition avec l'idée de développement harmonique régulier, mais sous une forme
paradoxale, un développement critique, où l'origine des objets des différentes périodes (orale,
anale ..) sont déjà pris pour autre chose que ce qu'ils sont. Car ils sont déjà "travaillés" par le
signifiant. La structure signifiante de ces opérations est impossible à extraire. On les désigne par
toutes les notions d'incorporation qui les dominent et permettent de les articuler.

Nous articulerons cette organisation autour de la notion du manque d'objet aux 3 niveaux
de frustration, privation, castration quand il y a crise, rencontre, dans la recherche (toujours
critique), d'objet. Nous commencerons avec la notion de frustration que les théories
analytique actuelles privilégient au détriment de la notion de castration, et une conférence de
Annelisse Schurmann élève d'Anna Freud sur une phobie d'enfant.
Nous verrons la succession temporelle, apparition puis disparition
de cette création imaginaire privilégiée qu'est une phobie et ses effets comportementaux.

Difficile d'en articuler l'essentiel avec la seule notion de frustration en rapport avec la privation
de l'objet privilégié du stade oral. Il est bien plus éclairant d'utilser les 3 catégories du manque :
la castration, où se situe le manque fondamental en tant que dette dans la chaîne symbolique,
la frustration, où le manque comme dam, dommage, se situe que sur le seul plan imaginaire,
la privation, où le manque est cette limite, cette béance purement dans le réel, c'est à dire pas
dans le sujet. Pour accéder à la privation, le sujet doit être capable de pouvoir symboliser le
réel, de le concevoir autre qu'il n'est. Cela précède la possibilité de dire des choses sensées.

Dans la psychogénèse courante tout se passe à la façon d'un rêve idéaliste où chaque sujet
est comme une araignée qui doit elle-même tirer le fil de sa toile et s'envelopper dans la soie
son cocon, sortir de lui-même sa conception du monde, sécréter de lui-même ses relations
au nom d'on ne sait quelle maturité pré-établie avec les objets qui finiront comme objets de
notre monde. On croit que la psychanalyse rend cela possible parce qu'on ne retient que ce
qui va dans ce sens. Et quand ça s'embrouille on attribue cela à une difficulté de langage alors
que c'est la manifestation de l'erreur. L'image du corps comme signifiant le montre bien.

Le problème de la relation d'objet doit être posé à partir de ce cadre fondamental que
dans le monde humain ce qui structure l'organisation objectale c'est le manque d'objet.
Et que ce manque est à concevoir à ses différents étages chez tout sujet :
au niveau de la chaîne symbolique qui lui échappe de son commencement à sa fin, au niveau
de la frustration où il est installé dans un vécu imaginable, pensable, et au niveau de réel
il ne s'agit pas de privation ressentie : le réel c'est ce qui est absolument hors du sujet, et pour
l'appréhender il doit d'abord l'avoir symbolisé. Et dans cette affaire le sujet n'est pas isolé,
il n'est pas indépendant, ce n'est pas lui qui introduit quoi que ce soit. (pour F. Dolto les enfants
dont la mère a subi un trouble dans sa relation à son propre père peuvent faire une phobie).

C'est un passage absolument majeur, que cette notion, qui fait intervenir autre chose
que la seule relation mère/enfant de personne à personne. C'est pour cela que j'ai
posé le trio mère-enfant-phallus : il y a toujours, chez la mère en tant qu'elle est femme
l'exigence du phallus. Que l'enfant le symbolise ou non, lui n'en sait rien. Quand on évoque
l'image du corps à propos de l'enfant : si cette image est effectivement l'enfant, si même elle lui
est accessible, est-ce parce que la mère voit son enfant ? Quand l'enfant est-il en mesure de voir
que ce sa mère désire, sature et satisfait en lui, c'est aussi son image phallique à elle ? Toute
relation entre sujets est-elle du même ordre que la relation de Mme Dolto avec son sujet ?
Est-ce qu'à part elle, qui voit toutes ces images du corps, il y a quelqu'un pour les voir aussi ?

Le fait que pour la mère l'enfant n'est pas seulement l'enfant, mais aussi le phallus
constitue une discordance imaginaire. L'expérience montre que l'enfant y accède, y est introduit
après une époque de symbolisation. Quelque fois il aborde ce qui est pour la mère un
dam imaginaire en rapport avec la privation du phallus de façon directe. S'agit-il alors d'un
imaginaire reflété dans le symbolique ? d'un élément symbolique qui apparaît dans l'imaginaire ?
Ce sont les points cruciaux où nous amenons la question de la phobie.

Pourquoi l'enfant se met à plus ou moins occuper la position de la mère par rapport au phallus ?
ou du phallus par rapport à la mère ?  L'enfant établit une liaison entre le phallus et la mère :
ce rapport lui est-il donné de façon spontanée et directe ? dans quelle mesure y met-il du sien ?
C'est plus compliqué que simplement regarder sa mère et voir qu'elle désire le phallus ....
Ce n'est pas autour de cette liaison-là mère/phallus que se développe la phobie.

La phobie constitue un mode de solution au difficile pb des relations de l'enfant et de la mère.
Nous avons vu que pour qu'il y ait les 3 termes du trio mère-enfant-phallus
il faut un espace clos, une organisation symbolique du monde qui s'appelle le père.
La phobie concerne ce lien cernant : il arrive qu'en un moment particulièrement critique,
en l'absence de voie d'une autre nature, la phobie est un appel à la rescousse
d'un élément symbolique particulier pour la solution du problème.
C'est sa singularité : être extrêmement symbolique, complètement éloignée de l'imaginaire.
L'élément symbolique appelé pour maintenir la solidarité menacée par la béance 
introduite par l'apparition du phallus entre la mère et l'enfant a un caractère
carrément mythique.



Fin de la troisième leçon
























































































jeudi 6 octobre 2011

S.IV : I, 2. Les trois formes du manque d'objet.



deuxième leçon du séminaire "La relation d'objet" (28 novembre 1958)
 "Les trois formes du manque d'objet".

Des psychanalystes ont écrit sur l'objet, plus précisément "génital" .. lectures instructives ..
Pour Renan "la bêtise humaine donne une idée de l'infini". Il aurait pu ajouter "et les divagations
théoriques des psychanalystes", car c'est frappant de voir à quelles difficultés extraordinaires
ont été soumis leurs esprits à la suite des énoncés, si abrupts et étonnants, de Freud.

Freud nous a apporté que : l'idée d'un objet harmonique
qui par sa nature achèverait la relation entre le sujet et l'objet est parfaitement contredite
tant par l'expérience analytique que par l'expérience commune, et de l'homme et de la femme.

Et s'il y a de l'analyse, c'est justement parce que l'harmonie dans ce registre est problématique :
il y a ds ce registre une béance, quelque chose qui ne va pas. (Malaise dans la civilisation,ou
Les nouvelles conf. sur la psychanalyse n°31) Ce qui ns amène à nous questionner sur l'objet.

L'expérience et la doctrine freudienne situent cet objet :
1. l'objet c'est ce qui se présente dans une quête, quête d'un objet perdu. Il s'agit
de l'objet retrouvé,pris dans une recherche (opposé à la notion d'objet "achevant" un sujet autonome).

2. l'objet en question est celui qui surgit de l'exercice du système primaire de plaisir 
avec la notiond""objet halluciné sur fond de réalité angoissante"".
(Opposée à cela, une pratique analytique avec la notion de l'objet réduit au réel, où ce qu'il s'agit de
retrouver c'est le réel : l'objet se détachant non sur fond d'angoisse, mais sur fond de réalité commune,
avec comme terme de la recherche analytique de s'apercevoir qu'il n'y a pas de raison d'en avoir peur,
"peur" étant à distinguer d"angoisse").

3. l'objet de la réciprocité imaginaire, quand dans la relation sujet/objet les deux places
sont occupées par le sujet : au fond de toute relation à l'objet il y a identification à celui-ci.
Une certaine pratique analytique moderne fait de l'identification un impérialisme :
"puisque tu peux t'identifier à moi et moi à toi, et que de nous deux c'est moi le meilleur modèle .."
l'adaptation à la réalité et le but idéal est "l'identification au moi de l'analyste".
Un tel maniement de la relation d'objet peut conditionner une déviation extrême, 
en particulier dans la névrose obsessionnelle :
la névrose obsessionnelle comme notion structurante, et l'obsessionnel
comme acteur qui assume certains actes comme s'il devait se mettre à l'abri de/par la mort.
=> montrer qu'il est invulnérable, s'exercer à un domptage qui conditionne son approche d'autrui :
dans une sorte d'exhibition il montre jusqu'où il peut aller dans cet exercice qui ressemble à un jeu,
y compris dans son caractère illusoire de montrer jusqu'où peut aller un autre, son double.
Il faut pour cela qu'il y ait une sorte d'Autre/Spectateur, là réside le plaisir.

Il sait que ce qu'il fait est à fin d'alibi, que le jeu ne se joue pas exactement où il se trouve lui,
que ce qui se passe n'a pas pour lui de véritable importance.
Mais ce qui est inconscient c'est qu'il ne sait pas quelle place il occupe, ni d'où il voit tout cela.
 Nous savons que c'est lui qui mène le jeu. Mais pour savoir où ce jeu est mené
il faut introduire la notion d'objet, de l'objet significatif pour un tel sujet

Cette objet ne peut être défini en termes de relation duelle, ou de notion d'objet telle que définie dans
Evolution de la psychanalyse et La clinique psychanalytique. Nous verrons où cela mène ..

Dans une situation si complexe la notion d'objet ne peut être donnée dès l'abord,
cet objet qui participe d'un jeu d'illusion, de triche, de rétorsion agressive
qui consiste à aller aussi près que possible de la mort tout en étant hors de portée des coups,
car il a "mortifié", "tué" à l'avance le désir chez lui.
La notion d'objet est infiniment complexe, à approfondir sans cesse pour savoir de quoi on parle,
c'est à dire : démontrer ce que ce sujet a articulé sans le savoir pour un Autre "spectateur",
en place de quoi il met l'analyste, à mesure que le transfert avance.

L'auteur en question manie la relation d'objet dans le cas de l'obsédé comme une scène de cirque,
où Auguste et Chocolat s'administrent des claques en alternance !=> descendre dans l'arène
par peur d'en recevoir pendant que le sujet en donne à proportion de son agressivité .. là-dessus
arrive un Mr Loyal "ce n'est pas raisonnable, bouffez-vous plutôt mutuellement votre bâton,
vous l'aurez alors à la bonne place, c'est à dire "intériorisé" !!..
 Cela apparaît sur fond de caractère profondément oral de la relation d'objet :
prendre ainsi la relation duelle pour réelle soumet la pratique aux lois de l'imaginaire
avec pour aboutissement de cette relation d'objet le fantasme d'incorporation phallique.

Donc non seulement l'expérience ainsi menée révèle ses paradoxes, en ne menant pas vers
l'accomplissement idéal, mais l'accomplissement in fine de cette relation duelle révèle
qu'au 1er plan l'objet imaginaire privilégié est le phallus.
Et que pour comprendre la relation d'objet il faut penser le phallus comme étant
non pas un élément médiateur, mais un élément tiers.
C'est ce que montrait mon schéma de l'année dernière en conclusion de l'analyse du signifiant,
où nous avait menés l'exploration de la psychose.

Je vous le propose cette année comme introduction, comme schéma inaugural de la relation d'objet,
Je ne trouve pas de schéma du triangle imaginaire Mère-Enfant-Phallus (M.E.Phallus)
il faut donc regarder les deux que je mets ici en ne considérant que la partie du haut :













Toute relation imaginaire est modelée sur le rapport fondamental mère-enfant et sa problématique.
C'est un rapport qui donne l'idée qu'il s'agit d'une relation réelle uniquement,
 et une certaine psychanalyse actuelle essaie de la réduire à n'être
qu'une affaire de développement de la relation initiale mère-enfant, et à ses traces et reflets.
Mais dès qu'on fait intervenir cette seule relation imaginaire
se révèle un point-clé au centre de celle-ci : le phallicisme imaginaire,
aussi bien dans l'expérience analytique que dans la théorie.
Et toute tentative de le réduire à des données uniquement réelles, sans tenir compte
qu'on peut être dans l'imaginaire, dans le symbolique, ou dans le réel, conduit à des impasses.

Un dernier trait sur la conduite de la relation duelle par ces praticiens : quand l'analyste
entre dans le jeu imaginaire de l'obsessionnel, insiste pour qu'il reconnaisse son agressivité,
lui fait replacer l'analyste dans une relation duelle (belle analyse des "réciproques" !) :
on nous dit que la preuve de la méconnaissance de la situation par le sujet serait que le sujet
ne voudrait jamais assumer l'agressivité, ou qu'il serait agacé par la rigidité du dispositif !
En fait l'auteur avoue par là qu'il ne cesse de ramener lui-même le sujet à ce thème.
Comme si c'était un thème central !
Comme si agacement et ironie n'étaient que manifestations agressives, ce qui n'est pas le cas,
et que d'autre part l'agression peut être provoquée par d'autres sentiments, y compris l'amour.
Dire que l'ironie est par nature agressive est incompatible avec ce fait qu'elle est, avant tout,
et bien loin de toute agressivité, un mode de questionnement, et que même si celui-ci
comporte un élément agressif, il est secondaire.
Bon. C'est mon dernier mot sur cette conception de la relation d'objet.

Revenons à la question fondamentale, celle d'où partir, et à laquelle nous devrons aboutir,
du fait que toute l'ambiguïté de la question autour de l'objet, et de son maniement dans l'analyse,
se résume à : L'objet est-il, ou non, le réel ? à quoi nous arrivons aussi bien
par intuition immédiate que par le vocabulaire dont ns ns servons : symbolique, imaginaire, réel ..
Que veut dire "la relation d'objet dans son versant d'accès au réel doit être obtenu en fin d'analyse" ?  
Est-ce un réel à trouver dans un objet ? ou un objet que serait à trouver dans le réel ?

C'est saillant ds l'expérience analytique, que toute la dialectique du développement individuel
et toute la dialectique de l'analyse, tournent autour du phallus, qui devient un objet majeur.
Et qui n'est pas le pénis, attention !
On ne peut pas dire que le phallus n'est pas un objet prévalent, dont l'individu pense qu'il l'est, 
dans la dialectique analytique.
Même s'il n'a jamais formulé qu'il n'était concevable que sur le plan imaginaire, cela surgit
à toutes les lignes de Freud à une certaine date, ou les réponses de Deutsch, Klein, Jones.


Avant de voir comment la notion de phallicisme implique la catégorie de l'imaginaire,
demandons-nous quelles sont les positions réciproques de l'objet et du réel. Le réel d'abord :

Les conditions de l'expérience étant très artificielles, la situation n'est pas simple : pour théoriser
il faut se référer au réel alors que nous ne partageons pas la même notion, maniement, ou usage.
Disons qu'il s'agit d'abord de l'ensemble de tout ce qui se passe effectivement.
= Wirklichkeit en allemand, qui implique toute possibilité d'effet, de Wirkung.
C'est l'ensemble du mécanisme. La traduction française le rend mal, alors que c'est à cette notion là
de réalité que les psychanalystes doivent être introduits. La tradition mécano-dynamiste datant du 18e
qui réfère ce qui se passe au niveau mental à quelque chose de matériel n'a aucun intérêt.
C'est une succession d'effets avec leur ordre propredans une perspective énergétique. 
C'est dans ce sens que Freud l'emploie.

Mais la matière exerce une fascination telle sur l'esprit médical que même dans l'analyse
des médecins s'appuient sur une réalité organique : besoin de réassurance, comme toucher du bois
ou cantonner cette énergie à celle qui sort de la machine qui remonte le Rhin. Or l'énergie
ne nous intéresse qu'à partir du moment où elle est accumulée.
Les machines peuvent toujours s'animer par la propulsion venue du fleuve, l'énergie et la force
sont d'un ordre différent : il faut être fou pour vouloir retrouver dans ce qui est accumulé à la fin
comme élément possible de Wirklichkeit quelque chose étant là de toute éternité : ce n'est pas ça.

Ce besoin de confondre le stoff/impulsion/tendance/flux, avec ce qui est en jeu dans l'exercice de
la réalité analytique, est une méconnaissance de la Wirklichkeit symbolique qui est organisation,
 structure, ou conflit d'éléments qui se composent et s'édifient sur une autre portée énergétique.
 Conserver le besoin de parler d'une réalité dernière comme si elle n'était pas dans l'exercice même
 c'est de la superstition, c'est une séquelle du postulat organiciste qui n'a aucun sens,
c'est méconnaître que nous nous déplaçons, en psychanalyse, dans une réalité particulière.

La notion de réalité dont on fait usage dans l'analyse est mise en jeu dans un double principe,
principe de plaisir + principe de réalité, s'exerçant de façon réelle, que l'analyse doit démontrer.
Opposer les deux termes fut fécond ==> introduction système primaire / système secondaire
ds l'ordre psychique. Mais aujourd'hui ? L'enfant qui dit que le roi est nu est-il un génie ? un benêt ?
est-il féroce ? Personne n'en saura jamais rien. Juste que c'est quelqu'un de libérateur.

Cela arrive de temps en temps : des analystes, qui ont l'espèce d'intuition primitive que ce qu'on disait
n'explique rien. C'est arrivé à Winnicott avec l'objet transitionnel, la transition d'objet :
il fait remarquer qu'on s'intéresse de plus en plus à la fonction de la mère comme décisive dans
l'appréhension de la réalité par l'enfant. C'est à dire qu'à l'opposition dialectique impersonnelle
des principes (plaisir et réalité), on a substitué des acteurs : même si les sujets sont idéaux,
on en vient à une sorte de figuration, un guignol imaginaire.
Nous avons le principe de plaisir avec une certaine relation d'objet (la relation au sein maternel)
et le principe de réalité au fait que l'enfant doit apprendre à s'en passer.

Winnicott fait remarquer à quelles conditions tout se passe bien. Quand ça va mal, c'est attribué
à une anomalie primordiale, la frustration, le terme devenant un terme-clef au point que,
pour que l'enfant ne soit pas traumatisé la mère doit opérer en étant là au moment qu'il faut :
placer, au moment de l'hallucination délirante de l'enfant, l'objet réel qui le comble.
C'est à dire qu'au départ de la relation -idéale- mère/enfant il n'y a pas distinction entre
l'hallucination du sein maternel qui surgit par principe du système primaire, et la rencontre
de l'objet réel dont il s'agit. Si tout se passe bien l'enfant n'a donc aucun moyen de distinguer
- la satisfaction fondée sur l'hallucination liée au fonctionnement du système primaire
- l'appréhension du réel qui le comble, et le satisfait de manière effective.
Et la mère apprend alors progressivement à l'enfant à subir les frustrations et du même coup
à percevoir, sous la forme d'une tension inaugurale, la différence entre la réalité et l'illusion.
Différence qui s'installe par la voie du désillusionnement quand, de temps en temps,
la réalité ne coïncide pas avec l'hallucination qui surgit du désir.

Ce que fait remarquer Winnicott c'est que dans une telle dialectique on ne peut rien élaborer qui
aille plus loin que la notion d'un objet strictement correspondant au désir primaire.
Dans une telle dialectique, incarnée dans 2 acteurs réels, l'extrême diversité des objets,
objets instrumentaux ou fantasmatiques
qui interviennent dans le champ des désirs humains, est impensable.
Et, c'est un fait d'expérience nous voyons apparaître même chez le plus petit enfant
ces objets, dits par Winnicott transitionnels, parce que nous ne pouvons pas dire de quel coté
ils sont dans la dialectique réduite, et incarnée, de l'hallucination et de l'objet réel.

Tous les objets de jeu de l'enfant sont transitionnels : l'enfant fait des jouets avec tout ce qui
lui tombe sous la main, et ils sont transitionnels. Pas besoin de se demander s'ils sont + subjectifs
ou + objectifs, ils sont transitionnels et, ce que ne dit pas Winnicott, ils sont imaginaires.

Dans leurs travaux pleins d'hésitations et confusion, les auteurs cités plus haut, cherchant
à s'expliquer l'origine d'un fait (par ex l'existence d'un fétiche sexuel), sont amenés à ces objets
parce qu'ils cherchent les points communs entre l'objet chez l'enfant, et le fétiche des exigences
objectales de la satisfaction sexuelle : alors ils épient chez l'enfant le maniement d'un objet
dérobé à la mère (mouchoir, coin de drap ou autre partie de réalité à sa portée) dans une période
appelée transitionnelle mais pas intermédiaire, puisque bel et bien permanente ds le développement
En confondant les 2 types d'objets, ils évacuent le fait qu'il y a une distance entre
la première apparition de l'objet en tant qu'imaginaire,  et l'érotisation d'un objet-fétiche.

En ne tenant pas compte de cette distance, ils oublient (et ça les oblige à ces supplémentations)
qu'un des ressorts les + essentiels de l'expérience analytique, dès le début,
c'est la notion du manque de l'objet.
Jamais, dans notre exercice concret de la théorie analytique, nous ne pouvons nous passer
de cette notion centrale, ce ressort même de la relation du sujet au monde.

Dès le départ l'analyse, l'analyse de la névrose commence par la notion paradoxale de castration.
La Castration la frustration et la privation sont trois choses non équivalentes.

La notion que nous avons de la frustration quand nous l'utilisons, est celle d'un dam : un tort, un
dommage, une lésion imaginaire qui ressort du domaine de la revendication : quelque chose
qui est désiré n'est pas tenu parce que c'était sans référence toute possibilité de satisfaction
ou d'acquisition. La frustration est du domaine des exigences effrénées et sans loi.
Le plan sur lequel se situe cette catégorie du manque est celui du dam imaginaire.

Quelle est la différence avec la privation ? Jones ns dit qu'elles sont éprouvées de la même façon
ds le psychisme. Nous nous référons à la privation dans le cadre du phallicisme, l'exigence
du phallus comme point majeur de tout le jeu imaginaire,
dans la progression conflictuelle de l'analyse du sujet, nous dit Freud.
Or on ne peut parler de privation que dans le réel, qui n'est pas l'imaginaire.
L'exigence phallique ne s'exerce pas par là, car un être présenté comme une totalité
ne peut pas se sentir privé de quelque chose que, par définition, il n'a pas. Ainsi la privation,
dans sa nature de manque, est essentiellement un manque réel. Un trou.

Qu'en est-il de la castration ?
Elle a été introduite par Freud de façon absolument coordonnée à ce qu'il y a de fondamental
dans l'interdiction de l'inceste et la structure de l'OEdipe. Par une espèce de saut mortel
il a mis au coeur et de l'expérience, et de la crise décisive, formatrice, majeure, qu'est l'Oedipe,
cette notion si paradoxale de castration, qui se classe ds la catégorie de la dette symbolique.
Quel émerveillement, après-coup, et de ceci, et que nous ne songions qu'à n'en pas parler !

=> dam imaginaire,  absence réelle,  dette symbolique,
voilà ce qui nous permet de situer ces trois termes de référence du manque de l'objet.
Qu'est-ce que l'objet qui manque, à ces trois niveaux ?

Au niveau de la castration/dette symbolique ce qui manque N'EST PAS UN OBJET REEL.
Ce que sanctionne la loi de la castration symbolique  N'EST PAS UN OBJET REEL. Ce n'est pas
la loi de Manon où celui qui a couché avec sa mère doit se les couper et filer vers l'Ouest jusqu'à
ce que mort s'ensuive. Ces choses sont excessivement rares, elles sont d'un ordre qui n'a rien
à faire avec notre expérience et les mécanismes psychiques structurants qui y sont mis en jeu.
L'objet, dans la castration dont il s'agit en psychanalyse, est imaginaire : il s'agit donc de
castration symbolique d'un objet imaginaire

La communauté entre caractère imaginaire du manque dans la frustration et caractère imaginaire de
l'objet de la castration (manque imaginaire de l'objet) a fait croire qu'avec la notion de frustration
on pouvait aller au coeur des problèmes. Or manque et objet ne sont pas forcément au même niveau.

Même si la frustration est en elle-même imaginaire, c'est toujours d'un objet réel que l'enfant,
par exemple, comme sujet élu de notre dialectique, est en mal. Cela montre qu'il faut un certain
maniement métaphysique des termes quand on se réfère au critère de réalité.

Et l'objet de la privation n'est jamais qu'un objet symbolique car comment un objet peut-il
ne pas être à sa place ? Cela ne veut rien dire au niveau du réel, ce qui est réel est toujours à
une place, il porte sa place à la semelle même de ses souliers, même si on le dérange. L'absence
de quelque chose dans le réel est donc purement symbolique : c'est parce que nous le définissons
par une loi qui dit que ça devrait être là, qu'un objet peut manquer à sa place. Quand on dit d'un livre
de bibliothèque qu'il manque à sa place, il y est par principe invisible, même s'il est tout à coté, et le
bibliothécaire vit dans un monde symbolique ==> quand nous parlons de privation, en psychanalyse,
il s'agit de rien d'autre que d'un objet symbolique.
Cela paraît abstrait, mais cela aidera à détecter les mauvaises solutions données à de faux problèmes.
On fait des efforts désespérés pour rompre cet intolérable qu'est l'évolution absolument différente
de la sexualité chez l'homme et chez la femme, et tenter de ramener les 2 termes à 1 seul principe.
Or il existe dès le départ quelque chose qui permet de concevoir clairement pourquoi l'évolution
est différente entre les deux sexes.

Avec le manque, et l'objet, une autre notion trouvera sa place : celle de l'agent.
La référence à la triade imaginaire mère/enfant/phallus doit être complétée avec la notion d'agent
qui joue un rôle dans la manque de l'objet.
Par exemple s'agissant de la frustration, si nous supposons que l'agent c'est la mère, est-ce un agent
Symbolique ? Imaginaire ? Réel ? Et l'agent de la castration ? et   de la privation ? I ? S ? R ?

Je laisse ces questions ouvertes, la notion d'agent débordant celle des seuls rapports entre
l'objet et le réel, et des catégories de l'imaginaire et du réel, même si elle nous est suggérée par
le début de la construction du phallus.


-  fin de la deuxième leçon  -

La suite est là :
http://www.blogger.com/blogger.g?blogID=42274923904225665#editor/target=post;postID=1894036064126316667



























































mercredi 5 octobre 2011

Sém.IV, 1ère leçon : la relation d'objet et les structures freudiennes.


De novembre 1956 à juillet 1957 Jacques Lacan a donné des leçons sur la psychanalyse,
pour la quatrième année -scolaire- consécutive. Il appelait cela son séminaire.
On disait alors, comme on le dit depuis, "le séminaire de Lacan".
Après "Les écrits techniques de Freud" en 53
"Le moi dans la théorie de Freud et dans la technique de la psychanalyse" en 54,
et "Les psychoses" en 55,
ce séminaire fut intitulé  " La relation d'objet ".


Femme allaitant -Paul Richer-


Quand on cherche à se renseigner sur ce séminaire, pensant trouver pléthore de propositions
commerciales d'éditeurs divers et variés, on tombe sur une seule et unique édition, et 
une image terrifiante nous saute à la figure : Saturne dévorant ses enfants peint par Goya.
Saturne, qui n'est pas une femme, ni une mère.

Pour peu qu'on cherche à en savoir plus en lisant la quatrième de couverture, on est agressé par
une autre terrification : ".. mère inassouvie .. cherchant ce qu'elle va dévorer .. gueule ouverte .." 
dont la violence ne risque pas d'être tempérée par la citation qui suit,
arrachée au discours de Lacan, isolée, incompréhensible.

Quelques mots, extraits tels quels d'un discours qui en comporte des millions,
amputés avec brutalité de tous ceux qui les précèdent et de tous ceux qui les suivent,
 et qui pourraient en ajuster la signification,

font dire à Lacan ce qu'il n'a pas dit, et à la psychanalyse ce qu'elle ne dit pas.

J'ai choisi, comme image d'introduction à ce séminaire,
une autre image que celle de Saturne choisie par JAM.
J'ai choisi une miniature de Paul Richer : Femme allaitant.

On pourrait croire, à contempler cette oeuvre, que mère et enfant sont seuls au monde.

Ce n'est pas le cas.

                                                                   
          Ceci m'amène à la raison pour laquelle je commence l'étude des séminaires, ici, par le quatrième.
De 2007 à 2009 j'ai re-lu chronologiquement tout ce que Freud a produit, sauf la correspondance
récemment publiée. (Je ferai un article sur ce que veut dire exactement "lire Freud", ou "lire Lacan".)
En 2010 j'ai entrepris la re-lecture des leçons données par Lacan, oralement, pendant 30 ans.
Arrivée, il y a deux mois, à la sixième année, celle de "Le désir et son interprétation",
 je me suis heurtée, et j'ai été heurtée, encore,
 par ce quelque chose balancé bêtement, ou sadiquement, c'est selon,
que pour Lacan et la psychanalyse les mères seraient des crocodiles "dans la gueule desquels" on est.
((à noter ici que la bêtise actuelle qui consiste à punir les mots, pris pour la chose qu'ils évoquent,
en les faisant disparaître  avec plus ou moins de succès du vocabulaire,
-voir le magnifique amuse-gueule devenu ce ridicule et bien plus salace "amuse-bouche"-
s'accommode sans broncher de la "mère-gueule-de-crocodile."
Maladie qui ne m'a pas été épargnée, mais dont je me suis guérie.
Un peu toute seule, à force de coups, reçus,
mais aussi en relisant ce que Lacan a réellement dit, pour savoir comment ça a commencé,
cette affaire là, du (!) crocodile à la gueule grande ouverte, qui en fait jouir plus d'un.

Entre-temps j'ai rendu le blog public, et une rubrique "étude des séminaires" semble un bon support.


La première partie du séminaire cette année traite
d'une théorie du manque d'objet et des voies que peut prendre le désir,
(la deuxième relatera la phobie d'un petit garçon de 5 ans, en rapport avec la structure des mythes).

Voilà ce que je prélève, à ma manière, dans cet enseignement,
et que je vais tenter de transmettre, à ma manière forcément.
                                                                   
1 ère leçon,  21 novembre 1956.

L'évolution de la psychanalyse pourrait donner une place centrale, aussi bien en théorie qu'en pratique,
à la relation d'objet. Nous nous sommes interrogés dans les séminaires passés sur les structures
dans lesquelles l'analyse se déplace et opère selon Freud, et spécialement la relation complexe
entre les deux sujets en présence dans l'analyse : l'analysé et l'analyste. Nous avons vu, en trois ans :

1953/54 : les éléments même de la conduite de la cure : transfert et résistance,

1954/55 : le fond de l'expérience et de la découverte freudienne : l'inconscient, notion qui a imposé
à Freud d'introduire les principes figurant dans l'au-delà du principe de plaisir,

1955/56 : l'absolue nécessité d'isoler cette articulation essentielle du symbolisme qu'est le signifiant,
pour aborder analytiquement le champ paranoïaque des psychoses.

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Je n'arrive pas à importer la photo du schéma L ou schéma en Z de Lacan, 

c'est peut-être aussi bien, je vais démonter le truc : à vos stylos et règles !

Un trait plein de 4cm entre un point (a)(moi) et un point (a')(l'autre) figure cette relation.
L'autre avec un petit a est appelé aussi le petit autre, ou le semblable, ou l'autre semblable. 

Couper cet axe a ----- a' en son milieu par une barre verticale en pointillés de 4 cm

à sa base le point (A), qui figure l'Autre, ou grand Autre, le trésor des signifiants du sujet.

quand (a) parle avec (a'), il s'adresse à lui en tenant compte de ce qu'il imagine que (a') pense,

et quelque chose de (a') influence son discours, qui lui "revient" avec cette "charge" imaginée.
le trait (a) (a') est en fait une flèche a <---- a' , un axe appelé sur ce schéma "axe imaginaire".

mais l'autre, (a'), n'est pas le seul élément à influer sur la discussion de (a) avec (a'),

l'inconscient (ce qui vient de l'Autre) de celui qui se présente avec son moi, a, sans qu'il le sache,
un effet sur lui et donc on trace une flèche qui va de (A) sur (a) le moi A -> a' .
et un effet sur son discours :  une flèche qui part de (A) achoppe sur l'axe imaginaire.

Tout ce qui part de (A) reste inconscient pour le moi conscient du sujet. Mais ce quelque chose,

qui est là, peut l'influencer sans qu'il s'en rende compte (par exemple il peut faire un lapsus).
Aussi le trait plein qui part de (A) puis qui coupe l'axe imaginaire, se poursuit ensuite en pointillés,
pour aboutir au point (S), le Sujet,
 composé d'un (moi) sociétal conscient, ET  d'un inconscient qui "existe quelque part" .
Ce Sujet de l'inconscient, en S, est méconnu par le (moi) conscient du sujet en conversation mondaine.
 et il est encore plus ignoré de l'autre (a') de la relation, celui qui entend le discours.
Pourtant il peut, à l'occasion, si le premier fait par exemple un lapsus comme on l'a vu plus haut, 
percevoir que quelque chose s'est échappé là. Ce pourquoi on trace une flèche,
mais en pointillés, qui, partant de (S), atteint l'autre (a' )

 Les schémas et les formules de Lacan pour figurer ce qu'il explique aident certains 

à mieux comprendre les leçons. Mais pour d'autres, dont je suis, une fois que j'ai vu, étudié 
et compris le schéma, je me satisfais mieux de dire les choses ainsi par exemple : 
quand Castor et Pollux discutent ensemble et s'adressent l'un à l'autre, 
leur discours ne reflète pas entièrement leur pensée, parce que deux éléments influent sur cediscours :
- ce qu'ils imaginent sur l'autre fait retour dans ce discours en l'influençant,
- leur inconscient, qui ex-siste quelque part Ailleurs, peut soudain y causer un accident 
de langage en percutant le discours policé, et bousculer ce qu'il était censé maîtriser.

Sur le schéma tel que Lacan l'a dessiné, et tel qu'on le trouve en tapant "Lacan schéma L",

ce qui se présente comme base c'est la relation (moi)(a) <-- (A)utre, inscription du sujet à l'Autre,
à quoi j'ai fait faire 1/4 de tour à droite pour partir de la relation imaginaire entre le moi et l'autre.
(tout sujet se présente visiblement aux autres, en société, avec son moi sociétal, et inversement.)
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ce schéma rend compte de l'inscription du sujet à l'Autre : le rapport de parole virtuel,
constitué en début d'analyse,  quand le sujet reçoit de l'Autre son propre message, sous la forme
d'une parole inconsciente. Un message par lui profondément méconnu,
parce que déformé, arrêté, capté, "interdit" en somme,
car la relation imaginaire qui existe entre son moi(a) et l'autre(a') qui est son objet s'interpose.
Cette relation imaginaire entre le moi et l'autre, est essentiellement une relation aliénée,
qui interrompt, ralentit, inhibe, inverse, et de ce fait méconnaît profondément le rapport de parole
qui existe entre le sujet et l'Autre, ce "sujet par excellence" capable de tromper.

Des analystes font prévaloir la relation d'objet comme primaire, y recentrent
la dialectique principe-de-plaisir/principe-de-réalité, et fondent la progression analytique sur
une rectification du rapport sujet/objet considéré comme relation duelle qui serait
excessivement simple, et sur quoi se calquerait la relation analytique.

Cette relation du sujet à l'objet dans la théorie analytique,
c'est ce que nous allons mettre à l'épreuve en introduisant notre schéma ,
où la relation d'objet en son aspect duel est la ligne a ---- a' .

Un ouvrage collectif  récent montre cette clinique entièrement centrée sur la relation d'objet,
avec une monotonie et une uniformité frappantes, et des praticiens
qui tentent d'ordonner leur esprit autour de celle-ci, sans en retirer une pleine satisfaction.
Mais dès lors qu'on conçoit l'expérience dans un sens, on doit la mener dans le même sens,
car théorie et pratique analytique ne sont pas dissociables l'une de l'autre.)

Introduire la question de la relation d'objet nécessite de savoir ce que cette notion doit à Freud.
Le guide que nous nous imposons est de partir du commentaire freudien.Or la "relation d'objet"
 n'y figurant pas sous la forme de ce qui est affirmé plus haut. Nous partirons de ces textes, récents,
puis, en fin du séminaire, reviendrons aux positions freudiennes concernant la notion d'OBJET.

Nous avons rencontré, en trois ans d'analyse de textes, comment Freud aborde l'objet :
-> dans "Trois essais .." le dernier paragraphe s'intitule " la trouvaille de l'objet",
-> de plus il est question d'objet chaque fois qu'entre en jeu la notion de réalité,
-> et aussi dans l'ambivalence des relations fondamentales, quand le sujet se fait objet d'un autre,
ou qu'il est dans une relation où il y a réciprocité patente, constituante, grâce à un objet.

J'insiste sur ce fait que les relations à l'objet d'en face apparaissent sous ces trois modes.
Quelque chose en apparaît dans "L'Entwurf" (publié contre la volonté de Freud) puis dans
"Les trois essais .." chap.3, qui est que : pour l'homme, toute façon de trouver l'objet 
n'est jamais que la suite de la tendance à re-trouver un objet perdu. 
Rien à voir avec l'objet de la théorie moderne qui serait pleinement satisfaisant, typique, objet
 par excellence, harmonieux, et fonderait l'homme dans une réalité adéquate à la maturité génitale.
Freud, théorisant l'évolution instinctuelle à partir des 1ères expériences analytiques, indique bien
que le saisissement de l'objet se fait par la recherche de l'objet perdu, et que l'objet de la maturité
des instincts, c'est l'objet re-trouvé du 1er sevrage, des 1ères satisfactions infantiles.
Cette "répétition" instaure une discordance, et une nostalgie de l'objet perdu marque tout l'effort
de recherche, toute "retrouvaille" du signe de l'impossible, car cela ne peut pas être le même objet.
Ce processus induit une tension dans la relation sujet/objet, qui fait que ce qui est recherché
(une satisfaction passée et dépassée) ne l'est pas au même titre que le nouvel objet qui sera trouvé,
et qu'il est "trouvé" ailleurs que là où il est cherché.

Toute recherche de l'objet comporte ainsi un élément conflictuel qui introduit une distance.
C'est sous cette 1ère forme qu'apparaît la relation d'objet chez Freud.
 (rien à voir avec la notion d'objet adéquat attendu puis coopté une fois le sujet mature.)
Notion freudienne de re-trouvaille de l'objet perdu, du même registre que la notion platonicienne
de reconnaissance d'un objet "pré-formé", et celle de Kierkegaard d'une répétition, jamais satisfaite.

Freud situe d'emblée la notion d'objet dans un rapport conflictuel entre le sujet et son monde,
et une opposition entre le principe de plaisir et le principe de réalité s'incluant l'un l'autre :
le principe de réalité est constitué par ce que la satisfaction impose au principe de plaisir,
et inversement, il implique en lui la tension inhérente au principe de plaisir.
Pourtant il y a entre eux une béance : le pr. de plaisir tend vers une réalisation irréaliste,
le pr. de réalité implique que ce qui est saisi peut être fondamentalement différent de ce qui est désiré
C'est un rapport qui inclut dans la dialectique du sujet et de l'objet un 3ème terme irréductible.

De même que le sujet est voué, dans ses exigences primordiales, à un retour impossible,
de même la réalité est dans une opposition foncière avec le retour recherché par la tendance.
La satisfaction du principe de plaisir étant toujours sous-jacente à toute création ds le monde,
toujours sous-jacente au moi,
elle tend toujours plus ou moins à se réaliser, dans une forme plus ou moins hallucinée,
a toujours cette possibilité de se "satisfaire" dans une réalisation irréelle.

Les deux positions, distinctes l'une de l'autre,
 montrent que le développement ne peut pas être centré sur la seule relation d'objet.
Sauf dans les relation qu'on appelle aujourd'hui "prégénitales" qu'elle se soutient :
directement, et sans béance : voir/êtrevu, attaquer/être attaqué, actif/passif ....
 relations vécues sur un mode qui implique toujours, plus ou moins manifestement,
identification au partenaire, réciprocité, ambivalence entre position-du-sujet/position-du-partenaire.
Relation sujet/objet directe, sans béance, de l'un à l'autre et de l'autre à l'un,
littéralement d'équivalence et de réciprocité : en miroir. J'ai introduit le stade du miroir
dans la théorie analytique comme ce moment où l'enfant reconnait sa propre image,
sans que ce soit connoté à un phénomène développemental.
Il illustre le catactère conflictuel de la relation duelle, du fait que tout ce qu'apprend l'enfant
dans cette captivation par sa propre image
c'est la distance entre ses tensions internes et l'identification à cette image.
Cette mise au 1er plan de la relation sujet/objet n'est pas une raison pour la prendre comme échelle
phénoménale de tout conflit dans une dialectique entre les deux termes.

La mise en valeur du conflit conscient/inconscient, du fait que ce que cherche la tendance est obscur,
et que la conscience méconnaît avant de reconnaître, a été remplacée par un recentrage
sur un objet terminal, idéal, adéquat comme aboutissement (voir K Abraham..)
(alors que nous nous partons en arrière pour comprendre comment s'atteint un point "terminal" ..
 jamais observé dans la réalité, puisque l'objet idéal est littéralement impensable.)
Ces analystes travaillent à une normalisation du sujet, ce qui d'ailleurs introduit des catégories
étrangères au point de départ de l'analyse) L'accent y est mis sur un retour à une position objectivante
 de l'individu dans sa relation à son environnement, et que c'est cela qui serait significatif
ds l'observation du petit Hans : la psychanalyse comme une sorte de remède social en somme,
avec la structure du moi représentante des étapes de la maturation instinctuelle,
un moi mis au centre de l'analyse,
des objets (les prégénitaux, moi faible, besoin incoercible et illimité, pulsions à l'aspect destructif,
 et les génitaux avec un moi dont la force dépend d'aucun objet significatif.
Liquidation des conflits infantiles, adaptation heureuse au monde, personnalité harmonieuse,
limpidité cristalline de l'esprit, pulsions tendres, aimantes, désinteréssées etc..
voilà pour eux la relation d'objet génitale. Textes de véritables chieurs de perles,
avec une conception primaire de la notion analytique d'évolution instinctuelle (Glover, par ex)
Ce qui ouvre la grave question de l'issue d'une enfance, d'une adolescence, d'une maturité "normale".
 De plus, concernant cette notion d'objectiité : il ne faut pas confondre  l'établissement de la réalité,
et ce qui est visé dans ces textes sous les termes d'objectivité et plénitude de l'objet.
Il y a confusion : l'objectivité est présentée comme ce qui caractérise la relation à l'autre
dans sa forme achevée, alors qu'il y a une différence entre ce qu'implique telle construction du monde
 à telle époque déterminée, et la relation à l'autre dans son registre affectif,
tenant compte des besoins et bonheurs de l'autre.
L'analyse introduit une notion de l'objet bien différente d'un pur et simple correspondant du sujet,
avec cooptation entre un objet et la demande du sujet.
La constitution de l'autre en tant qu'il parle, qu'il est un sujet, porte beaucoup plus loin.

L'objet, c'est ce qui sert à parer au fond fondamental d'angoisse
qui caractérise le rapport du sujet au monde.
L'objet est à placer sur fond d'angoisse : c'est ce qui caractérise, à chaque étape, le sujet.
 J'illustrerai cela avec la conception freudienne, classique, fondamentale, de la phobie,
dont l'étude montre qu'il n'y a aucun rapport direct entre l'objet primitif
et la prétendue peur qui le marque : au contraire, il y a une distance fondamentale
entre cette peur qui peut être (ou pas,suivant le cas) primitive, et l'objet constitué dans la phobie
 pour la tenir à distance en enfermant le sujet à l'abri de ses remparts.
Cet objet est lié à un signal d'alarme,
il est un poste avancé contre une peur qui lui donne un rôle à un moment de crise.

Glover a fait prévaloir une notion moderne de la phobie. Il ne conteste pas l'angoisse de castration.
Mais ce désir de reconstuire les choses dans le sens génétique,
de réduire la construction de l'objet paternel à partir de constructions phobiques objectales primitives !
C'est un renversement de ce qui lie la phobie à l'angoisse
ce qui établit une fonction de protection au moyen d'un objet phobique.
Et le fétichisme ! Lui aussi remplit une fonction de protection contre l'angoisse de castration liée
à la perception de l'absence d'organe phallique chez le sujet féminin, et la négation de cette absence,
 qui fait que l'objet a une fonction de complémentation
par rapport à ce qui se présente comme un abîme dans la réalité.
Pour savoir ce qu'il y a de commun entre objet phobique et fétiche à partir de la relation d'objet,
on se demandera ce qu'est l'objet typique, idéal, fonctionnel,
ou les formes d'objets supposables chez l'homme.
Et pas se contenter d'explication uniforme pour des phénomènes différents,
 mais faire la différence entre la fonction d'une phobie et celle d'1 fétiche,
toutes les deux sur fond d'angoisse fondamentale, 
toutes les 2 appelées comme protection du sujet.
Ce sera mon point de départ.
Car il ne suffit pas de parler d'un objet en général, qui pourrait par on ne sait quelle communication
magique régulariser toutes les relations, comme si arriver à l'être génital résolvait toutes les questions.

Ce qui peut faire "objet" pour un génital, biologiquement, est aussi énigmatique que
tout objet de l'expérience humaine. Une pièce de monnaie, par ex, a valeur objectale :
car la perdre en tant que moyen d'échange nous amène à la question du fétiche.
Objet-fétiche, objet-écran, donc en rapport avec la constitution de la réalité telle que Freud l'a mise
en lumière de façon saisissante, avec la notion de souvenir-écran constituante du passé de tout sujet.
Pour introduire ce thème de la phobie et du fétiche, nous allons commencer
par le rapport entre l'usage général du mot fétiche et son emploi dans les perversions sexuelles :
retour à l'expérience pour donner sa véritable valeur au terme de relation d'objet.


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Dans son édition J.A.M. a découpé les séminaires, et donné des titres à chaque partie.

"LA RELATION D'OBJET" est subdivisé en 5 Parties :


     - Théorie du manque d'objet  (dont ns venons de voir la leçon 1 intitulée "Introduction")
     - Les voies perverses du désir (leçons VI à VIII.)
     - L'objet fétiche (IX à XI.)
     - La structure des mythes ds l'observation de la phobie du petit Hans ( XII à XXIII.) 
     - Envoi (leçon XXIV.)

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La deuxième leçon du séminaire est intitulée par JAM 
et se trouve dans le blog sous le titre :
Les trois formes du manque d'objet

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mercredi 21 septembre 2011

3 ème séance : Avant d'aller plus loin.



La Gradiva, celle qui marche.
licence CC-BY-SA 3.0 Wikipedia



Ce message est momentanément absent pour cause de restauration.











mercredi 17 août 2011

1 ère séance : Je reviendrai.

Femmes fellah puisant de l'eau. J.L.Gerome.

 Je reviendrai, un jour, sur "gargoulette". 
Ce qui vaut à ce mot de figurer ici en bonne place, c'est qu'il a "tracé sa route" 
au milieu d'autres mots-trésors, que cette route a croisé un jour celle de la psychanalyse,
de la clinique sous transfert *et qu'il a pris de ce fait une dimension particulière.
      Mais avant je vais faire un détour, ou plusieurs, des tours, ou des variations, 
sur ces mots qui tracent leur route** dans notre mémoire faite d'oublis.
La première variation c'est un texte d'Alain Merlet  intitulé "Manger sa soupe",
texte qui ouvre le recueil "Qui sont vos psychanalystes ?" paru en 2002.
Il y a dans ce texte des éléments qui me donnent l'impression d'une familiarité,
et d'autre part il entre en co-incidence avec l'idée qui sous-tend mon projet ici.

 C'est au cours de mon analyse que j'ai découvert à quel point nous nous plaçons, 
dans le cours de notre vie, sous le "patronage" de certains arrangements de mots
Cela m'arrive encore, et l'étonnement est toujours intact, sinon l'émerveillement. 
Jacques Lacan l'a formulé de mille manières, dont celle-ci :
"Dans la succession  de nos constructions fantasmatiques,
c'est toujours le même matériel qui tourne."
Oui. 
Déguisé, transformé, déplacé, condensé, trituré, dans nos constructions fantasmatiques, 
dans nos rêves, dans nos symptômes, il "trace", ce matériel, ce matériau : le mot
Si je pose que consacrer du temps à blogger est une formation symptomatique, 
alors une parenté sera inévitablement repérable entre les mots que je vais utiliser,
parce qu'ils me semblent adéquats alors qu'ils sont surtout attirants, et attirés.
Entre "Gargoulette" choisi pour ouvrir le blog, en être le point de départ, 
et dont je constate déjà à mes associations d'idées qu'il va le verctoriser,
et les mots qui résonnent dans le texte de ce parfait inconnu qui s'appelle Alain Merlet,
quelque chose "me parle", qui va me faire parler, et qui a déjà commencé.
"Soupière", par exemple, brille d'un éclat particulier, ainsi que "pierre", 
"rata", "ratatouille" .. éclat qui, je le sais par expérience, cache autant qu'il éclaire.


S'il "trace, ce "matériel", c'est qu'une force le propulse 
et le pousse à s'insérer dans nos discours : méconnaissable la plupart du temps,
mais insistant, invisible sauf indices qui peuvent être interprétés, si on le désire.
  L'existence et la force de ce qui insiste ainsi, de ce qui veut faire retour et se répéter,
a constitué le socle d'une oeuvre, d'une vie de recherches et de trouvailles, 
l'oeuvre de Sigmund Freud.

                                                 
* parler à un autre, dans les conditions de la cure psychanalytique, donne à certains mots
prononcés dans son contexte (la présence de l'analyste, qui facilite, autant qu'elle rend difficile, la parole)
                     un relief et un statut particuliers : on les connaissait, on les employait à l'occasion,                                 mais tout à coup voilà qu'on y revient plus souvent, 
et surtout, ils deviennent le point de départ de pensées, de souvenirs, 
pensées et souvenirs qui eux-mêmes en amènent d'autres, par associations.  

** j'ai choisi ce terme d'une part suivant l'expression "tracer sa route", qui signifie se frayer un chemin
     parmi des situations diverses, et que j'associe à une image : l'image de quelqu'un qui avance, 
plutôt vite mais surtout sans être distrait, et dont on dit :"regarde un peu, il trace, je te dis pas !".
D'autre part, "trace", dans notre psychanalyse freudienne, c'est ce qui, des événements vécus par le sujet,
subsiste en lui et est susceptible de faire retour dans ses rêves, ses symptômes, ses discours.

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