Daniel Pendanx sur le site
Oedipe (forum "mariage homosexuel"
) tient une position
anti-mariage homosexuel courageuse et très bien explicitée,
contre
J.A. Miller qui produit un texte/pétition-déclaration
pour le projet de loi.
Sur le site de
Patrick valas, Pendanx précise sa position, sa conviction,en appui sur les travaux
de
Pierre Legendre : il critique la pétition JAM &co, et regrette la censure exercée par le site
Oedipe envers les "anti".
On peut voir la différence entre son courage et les infinies précautions des autres, quand ce n'est pas
leur silence complet sur ce sujet, surtout s'ils s'interrogent sur les effets de cette "loi".
Charles Melman, par exemple, pas exempt de brutalité dans d'autres circonstances, marche sur
des oeufs dans de très courts articles, à lire sur le site de l'
A.L.I. (et à la fin de cet article)
Le texte de Pendanx (
http://www.valas.fr/Daniel-Pendanx-les-petitions-et-l-interprete,307)
n'est pas abordable par ceux qui ne connaissent pas la psychanalyse mais qui tentent
éanmoins de connaître les positions des psychanalystes, car il contient plusieurs notions qui prêtent
à des confusions malheureuses dans le grand public.
Je prends la responsabilité d'en extraire ce qui est susceptible d'être entendu du plus grand nombre (les autres peuvent aller au texte original). Cela donne une forme peut-être critiquable, ma seule préoccupation étant de ne pas trahir la pensée de Pendanx dans ce que j'en ai saisi.
C'est MA lecture.
Il n'y a pas de raison que le plus grand nombre n'ait accès qu'à JAM dans cette affaire.
D. Pendanx pense que vouloir, comme JAM, démarquer la psychanalyse de "certaines thèses" (extrémisme politico-religieux) n'est pas une raison pour cautionner les thèses d'une nouvelle dogmatique, d'un sujet qui serait libre de toute attache fiduciaire, d'un sujet dispensé de l'Oedipe.
Faire le malin, comme JAM au sujet des écclésiastiques, est plus facile que de saisir que le danger principal est du coté du nouveau familialisme, homoparental.
S'engager dans une résistance critique du projet est une autre paire de manche : cela demande une autre liberté et un autre courage politique que :
-
donner la religion comme un vulgaire consommable qu'on prend, ou non, dans un "marché des religions" made in USA,
-
occulter la question "d'où je cause" comme si la parole n'avait pas de fondements institués,
-
faire comme si la civilisation se déployait sans mythe fondateur (Genèse ou pas), mythe fondateur dont la représentation centrale est celle du couple originaire Père/Mère
- Adorer comme eux "le dernier lacan"
n'annule pas que Lacan a écrit dans
Les complexes familiaux : "
le sort psychologique d'un enfant dépend du rapport entre elles des figures parentales".
Ce rapport repose sur un étayage symbolique, culturel, institutionnel, noué à l'ordre langagier de nomination de la parenté, à partir de quoi on peut considérer la folie de la déconstruction en cours sans que ce soit du vieil oedipisme ou du vieux juridisme.
Le juridique, y compris celui d'aujourd'hui, a pour vocation anthropologique, clinique (voir Legendre), de faire valoir
la distinction entre les figures selon la logique structurale ternaire. Droit et juges ont aussi cette fonction symbolique, clinique.
Et non pas, comme le juridisme (Daniel Pendanx a une longue expérience de la justice des mineurs), de seulement gérer les comportements, le plus souvent dans les formes homoparentales du familialisme.
Droit et juges ont cette fonction de remettre en scène, symboliquement, la
représentation oedipienne qui fait valoir qu'il y a
un écart entre les figures, que papa et maman c'est distinct, que papa n'est pas une maman comme les autres, que "papamaman" ne fait pas Un, ne fait pas Totalité indifférenciée.
Il faut ouvrir les yeux sur la déconstruction des digues du droit s'il ne soutenant plus symboliquement qu'
un homme et une femme sexuellement ça n'est pas pareil. D'ailleurs prendre le droit, en général, de récuser le réel, c'est ce qui fonde le fantasme sous-jacent au totalitarisme.
L'incomplétude qui nous constitue en tant qu'être parlant a une facture institutionnelle externe au sujet.
C'est un fait juridique, symbolique : il n'y a de sujet de la parole que lié, quelles que soient ses orientations sexuelles, à une
représentation non faussée, une représentation
où les figures Père et Mère ne sont pas confondues.
Si nous n'avons pas à interdire les
fantasmes de scène primitive, quels qu'ils soient,
nous n'avons pas pour autant à nous faire serfs de ce que porte la future loi, une perversion de la fiction
originaire, entraînant la légitimation du fantasme dans la réalité.
Les pétitionnaires qui ont suivi JAM font comme si le juridique était distinct de la généalogie, distinct du principe du Père (rabattu par les ultraféministes sur la domination patriarcale), distinct de
la logique des places (qui n'a rien à voir avec inférieur/supérieur). En formulant que "
la structure oedipienne n'est pas un invariant anthropologique" ces praticiens ont-ils peur de passer pour non conformistes ? ne voient-ils pas le déséquilibre impliqué ?
Peu de psychanalystes leur ont répondu. Pour éviter le conflit ?
Leur formule choc et sans subtilité, assénée à l'emporte-pièce, se montre serve de l'ultra-libéralisme, du culte du MarchéLibreServiceNormatif. Elle évacue le fondement institué de la parole et de la clinique, conduit à des pratiques désarticulées de la problématique oedipienne et laisse ainsi le champ libre, sous couvert du sujet désirant "auto-fondé", aux positivistes technogestionnaires qui font du sujet une affaire de servitude et soumission consentantes.
Les deux formules :
"LAFemme" n'existe pas (c'est à dire : il y a LES FEMMES, et pas UneFemmeTotaleVirtuelle) et
"Il n'y a pas de rapport sexuel (c'est à dire ce que
Chouchou et
Loulou nous démontrent à longueur d'épisodes : on a beau s'aimer et faire l'amour tant et plus, entre les préoccupations respectives de l'un et celles de l'une IL N Y A PAS DE RAPPORT).
Ces deux formules consacrent un fait de structure, un fait langagier, institutionnel, un
effet des nominations de tous temps noué par le DROIT CIVIL. C'est ce nouage qui se trouve perverti, déconstruit, pousse-à-l'indifférenciation et à l'inceste (au sens psychanalytique d'indifférenciation). Le prêtre qui a eu droit aux cris d'orfraie n'a eu que le tort de passer un peu vite du registre de la REPRESENTATION au registre du réel.
Lacan n'a pas cessé de chercher à déjouer (et en dernier avec les noeuds) ce rabattement des registres l'un sur l'autre.
S'il y a une gageure politique, pour les psychanalyste, elle est plutôt (voir Legendre) de savoir comment livrer la psychanalyse au plus grand nombre sans en faire un mythe religieux, sans la forcer à tenir boutique, sans faire de l'analysant un menteur qui répèterait idiotement qu'il serait interdit d'interdire.
Un gouvernement souriant peut faire oublier que la tyrannie industrialiste est toute occupée au désarmement des sujets, à la manipulation du texte freudien, dans le but d'obtenir une soumission moderne.
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Je copie-colle les deux articles de Charles Melman consultables sur le site de l'ALI, précautionneux comme je l'ai dit, et plus encore dans le deuxième, où il montre, en faisant état d'une défaillance,
qu'il déserte carrément, qu'il prend la poudre d'escampette. Mais on sait lire entre les lignes.
à propos du mariage gay
Auteur : Charles Melman
11/01/2013
Le débat public semble confus, juste retour d’une question mal posée.
Peut-on y introduire autre chose ?
Remarquons d’abord que le mariage est une institution anthropologique, universelle donc, dont les cérémonies religieuses ou civiles marquent seulement la reconnaissance sociale.
En tant qu’institution le mariage organise entre collectivités humaines l’échange des femmes. C’est abusivement qu’on évoque à ce propos « l’interdit » de l’inceste puisque celui-ci n’est formulé nulle part, mais interprété à partir d’un réel qui lie la pérennité du désir sexuel au rapport à l’altérité. Cette apparente nécessité serait levée par l’homosexualité qui témoigne d’un goût fondamental pour le même (il est déjà à l’œuvre chez Platon) encore que la force du dispositif est telle qu’elle substitue régulièrement à l’identité du sexe des partenaires une altérité des places, apparemment incontournable. Si c’est le cas, l’identité sexuelle des partenaires ne devient-elle pas un problème indifférent ? Cette question prend place dans une « théorisation » qui depuis Deleuze envisage le corps comme un organisme à la recherche dans l’environnement d’une satisfaction indépendante du sexe attaché à ce corps comme à celui du partenaire.
La fantaisie – on ne peut même plus dire le fantasme – gagne ainsi sur l’anatomie et les prescriptions symboliques qui s’y attachent. Deux points restent alors en suspens dans cette promesse.
1) Une relation qui n’est plus médiée que par le goût des partenaires, sans référent tiers, débouche forcément sur le culte du dominant/dominé, un rapport de maîtrise réciproque qui n’a de sens qu’à aller à son terme.
2) La mise en cause, avec le mariage gay, d’une institution anthropologique interroge sur la nature de la spécification de l’homme dans le règne animal. On sait que pour les chercheurs dans lesdites neurosciences, il n’y en a pas. En restera-t-il une pour nos politiques ?
On Sem ?
Auteur : Charles Melman18/01/2013
Notre prochain séminaire sera celui de l’hiver du père. Certes on le savait mais le projet du mariage gay donne à ce savoir reconnaissance publique et légitimité. Hommes et femmes pourront se séparer et aller chacun de leur côté, et tenter de trouver dans la mêmeté du partenaire le remède au défaut de rapport sexuel. Prophétisée par Lacan la ségrégation exaltera, faute de père, le pouvoir d’un maître totalitaire, puisque toute altérité y sera perçue comme dommage et offense. De l’hommage au dommage, ce sera le parcours à faire. Ce n’est évidemment pas celui du nœud à 3 puisque la mêmeté des ronds n’est jamais que celle du trou qui les centre, et que le manque-à-jouir résultant ne peut être confondu avec le jusqu’à-plus-soif contemporain.
Ce qui est troublant est d’imaginer ce que pourrait être le déplacement du manque-à-jouir, à supposer qu’une écriture permette d’établir une proportion entre les deux sexes.
En ce qui me concerne je ne sais pas si ce sera plus ou moins de jouissance, mais je serai privé, pour des raisons triviales, des travaux de ces journées dont je n’aurai connaissance qu’à mon retour. Il est possible qu’ils n’en soient que plus intéressants d’être sous la responsabilité d’Angela Jesuino Ferretto, Claude Landman, Jean-Jacques Tyszler et Etienne Oldenhove dans la poursuite de notre cheminement.
Et le dernier en date, où il affirme un peu mieux sa position, mais c'est trop tard, d'où l'aigreur sous-jacente ?
Du coup la chose politique s'est faite sans lui. C'est ce qu'il voulait, ménager la chèvre et le choux et pouvoir dire, espérant que la loi ne passerait pas, que ce n'est pas de sa faute.
Mais les hommes politiques sont lâches, ils n'ont pas eu le courage que Melman n'a pas eu non plus. A qui la faute ?
Aux femmes, dit-il. C'est tout ce qu'il a trouvé.
11/02/2013
Double N
Si j’étais intervenu lors du dernier Séminaire dont nous devons l’excellente tenue à Angela**, Claude, Jean-Jacques, Étienne et nos autres amis, j’aurais fait remarquer qu’un papa, c’est d’abord une double négation. La première fait état du non qu’oppose le réel, la seconde dit non à cette opposition. Cette opération donne sa propriété au signifiant qui fait du non opposé par le réel au Un qu’il constitue alors, la condition du désir. Celui-ci n’exige donc nul outrepassement, puisque grâce à papa, il est prescrit. Du proscrit au prescrit, voilà bien l’espace de la névrose. D’autant qu’elle trépigne devant l’impossibilité du rapport sexuel, non seulement parce que celui-ci ne proposera que du semblant, mais parce que ce sera du semblant de… phallus, gardien du désir, le phallus est aussi l’unique objet dans l’Autre offert, dans cette dialectique-là, à la satisfaction.
Autrement dit il n’y a de jouissance offerte que de Dieu, sublime ou bien sexuée quand elle prend pour objet sa représentante, une femme donc, mais, comme on le voit, jouissance fondamentalement homosexuée. Si l’homme est un ravage pour une femme, c’est bien qu’il attend qu’elle soit Une, toute donc, comme lui. Et comme elle ne demande qu’à le satisfaire, elle inventera le féminisme, soit l’appartenance à un groupe où, en miroir de celui des hommes, elle est bien toute, les laissant au bonheur de batifoler entre eux, entre copains. Il ne reste plus qu’à bénir la ségrégation des sexes. Merci pour votre attention.
P.S. : Qu’on ne s’inquiète pas pour ma santé. Je dois à un lapsus de calendrier d’avoir été au soleil.
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** j'ignore comment, mais des internautes qui cherchent sur Google "Angela Jesuino-Ferruti" arrivent sur cet article de mon blog. C'est vrai qu'elle est psychanalyste. Mais sur ce blog il n'y a rien la concernant. Aussi je mets ce lien, qui renvoie à un de ses articles, qui peut-être intéressera certains :
Jesuino-Ferretto Angela, « Corpus christi ? Ou d'un nouveau type d'aliénation du corps », La revue lacanienne 2/ 2008 (n° 2), p. 54-58
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Concernant la manière de lire les discours suivant qu'on est un psychanalyste lacanien,
par exemple, ou un "psychanalyste" adepte de la théorie du moi façon USA,
un article de Liliane Fainsilber
peut-être intéressant à lire, où on repère à quoi ces psychanalystes réfèrent l'homosexualité :
à quelque chose du coté du désir, donc du phallus, pour Lacan,
à quelque chose du coté du comportement, pour d'autres :
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